Nous
trouvons à la fin d’un cycle, doublement si l’on peut dire puisque
cet âge, qui est notre âge présent, le Kali Yuga, coïncide
avec la fin d’un cycle plus étendu, qui correspond à la période
complète de notre humanité. Nous sommes entrés et depuis plusieurs siècles
dans une phase de décomposition qui s’accélère d’ailleurs -
c’est le propre des fins de cycles – et qui annonce d’une part
« la fin d’un monde », selon l’expression de René Guénon,
et la promesse d’un nouveau cycle complet, d’une nouvelle humanité.
Tout au long de ce dernier âge, l’humanité a en effet connu une dégénérescence
qui va en s’accélérant – et c’est ce que René Guénon décrit
de manière exemplaire en référence à l’organisation sociale de
l’Inde : le pouvoir spirituel appartient aux Brahmanes, le
temporel aux Ksatriyas, la révolte de ces derniers entraîne une première
« dégénérescence », car c’est du pouvoir spirituel
naturellement que le pouvoir temporel tient sa légitimité. René Guénon
date très exactement du règne de Philippe le Bel cette première émancipation
du pouvoir temporel en Europe. Par ailleurs, une fois le pouvoir
spirituel contesté, n’importe quelle classe inférieure peut
revendiquer la même indépendance et tenter d’usurper à son tour le
pouvoir :
« Comme l’usurpation appelle l’usurpation, dit René Guénon, après les Vaishayas, ce sont maintenant les Shûdras qui, à leur tour, aspirent
à la domination ; c’est là, très exactement, la signification
du bolchevisme.»
C’est ainsi que la révolution française marque le pouvoir des
Vaishayas comme la révolution russe celle des Shûdras. Il y a aussi
dans Autorité spirituelle et pouvoir spirituel dont la première
édition remonte à cette importante « prophétie » :
« Si les éléments sociaux accèdent au pouvoir d’une façon ou
d’une autre, leur règne sera vraisemblablement le plus bref de tous,
et il marquera la dernière phase d’un certain cycle historique,
puisqu’il n’est pas possible de descendre plus bas. » C’est
pourquoi, ce dernier « pouvoir » ayant fait faillite, il est
très exact de dire que nous sommes entrés dans un monde
post-moderne, Mais alors, la question se pose de savoir qui détient
le pouvoir ou, en d’autres termes, de savoir de quelle autorité
sommes-nous désormais à la merci ?
Ce
qui est indubitable, c’est que nous nous trouvons au terme d’un
cycle – le Kali Yuga – qui s’est caractérisé comme
« un temps où la connaissance spirituelle est devenue cachée, et
où quelques uns seulement peuvent encore l’atteindre, pourvu qu’ils
se placent dans les conditions voulues pour l’obtenir. »
La Tradition primordiale à laquelle il est fait référence dans
la sophia perennis d’un Schuon par exemple et dont découlent
toutes les autres traditions, est celle qui préside à notre Manvantara :
la tradition hyperboréenne. Les traditions de notre présent Yuga procèdent
quant à elles de la
tradition qui présidait au précédent cycle (l’Atlantide). De la même
manière, la création d’Adam se rapporte soit à l’Adam primordial
– l’Adam de l’Age d’Or, de ce présent Manvantara – soit à
l’Adam de notre cycle actuel – l’Adam de la tradition hébraïque.
A ce sujet, René Guénon rappelle cette parole du prophète de l’Islam :
« Avant l’Adam que nous connaissons, Dieu créa cent mille Adam ». |