HÖLDERLIN

1770 - 1843

 
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A Diotima

Première galerie

[Xavier Marmier]"Hypérion ou l'ermite en Grèce", 1831

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Susette Gontard

"Que je voudrais te rapporter fidèlement, mon aimé, comment j'ai vécu les tristes jours de notre séparation, si seulement le retour de ce temps ne m'était pas aussi douloureux et pénible!" (mars 1799).

 

 

 

 

HÖLDERLIN

Dans la montagne j’imagine qu’il s’est réfugié par ce mois de juin pluvieux chez sa tante. C’est un pays que je vois semblable à celui que m’avait fait entrevoir un grand voyage pendant mon enfance. Il est enfermé dans une toute petite chambre boisée, allongé, il regarde les lattes de sapin au-dessus de lui. Il a contre sa poitrine une image qu’il porte à ses lèvres avec une ferveur dont il n’a pas honte, car il aime, et là où personne ne le connaît, son corps délivré de la ville, de toutes ses entraves, recouvre sa nature. La pureté de son rayonnement éclipse enfin les traces des regards que les autres jettent sur lui. Alors il se révèle dans sa beauté, celle d’un divin jeune homme, ce qu’il est au fond de lui-même en dépit des autres et du temps. Dans mon souvenir il règne une transparence qui est la fraîcheur vibrante simplement de l’air à la montagne, et là autour de lui elle est doublée de deux essences en surcroît, celle de la pluie mariée aux verdures de juin, celle de sa propre présence malade et épurée comme par jeûne. Les fleurs rouges des géraniums et l’eau glaciale du tronc évidé de la fontaine s’accordent à l’audace qu’il a de prononcer ce que sa vie là-bas l’oblige à taire jusqu’à l’avilissement.

18 mars 1921

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Klauster Maulbronn