BIOGRAPHIE

Cette biographie a été établie en 1990, avec V.-M. Monteil lui-même, au cours d'une série d'entretiens dans le salon de son appartement parisien, aux murs couverts de livres, de souvenirs et de photographies : Louis Massignon, Le général de Gaulle, le colonel Khadafi et l'imam Khomeini 

SOMMAIRE

Bibliographie

Correspondance

Dossier secret sur Israël: le terrorisme

A propos de Louis Massignon

 

 

 

Vincent Monteil

Vincent Monteil, méhariste

  "Cher Monsieur,

    J'ai été très touché de votre lettre du 15 octobre.

    Je suis très heureux que vous ayez enfin obtenu de partir pour le Maroc.

    Attendez avant de penser à publier vos textes de berbère d'avoir pris contact avec un berbérisant professionnel qui vous situera exactement l'intérêt de vos documents dans l'ensemble déjà complexe de la bibliographie du sujet.

    Pour Lawrence, il faudrait que je revoie les textes dont vous me reparlez. (...)

    Rappelez-moi, je vous prie, au souvenir de votre Père, et croyez, cher Monsieur, à ma toute affectueuse et fidèle pensée devant Dieu"

Lettre de Louis Massignon, du 25 octobre 1938

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Parc national kirghiz, 14 juin 1979

 

 

 

 

 

 

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> Naissance, le 27 mai 1913

    Son père est Charles Monteil (1871-1949), receveur général des finances.  Il "m'a appris à aimer l'Afrique", dira de lui Vincent Monteil. C'est aussi un ami de Francis Jammes.

L'HOMME D'ADMIRATION

"Vous êtes le franc-tireur, l'enfant perdu, qui ravivez chez moi le désir d'évasion hors du monde." Louis Massignon

Louis Massignon

    C'est "mon père [qui] m'a envoyé à Massignon comme son propre père l'avait envoyé à J.-K. Huysmans".  Leur première rencontre, rue Monsieur, au domicile de Louis Massignon, aura lieu le 26 avril 1938.

    Louis Massignon compte ainsi parmi les "admirations" de Vincent Monteil, et il lui restera fidèle, même après sa conversion à l'Islam qui lui fera relire avec d'autant plus de lucidité l'œuvre de son aîné : il en témoignera dans sa biographie de L.M. : Le Linceul de feu.

Le général de Gaulle

 Autre "admiration" : le général de Gaulle qui lui adressera cette lettre :

    "Mon cher Vincent Monteil,

    Je vous remercie de m'avoir adressé votre livre les Musulmans soviétiques, que j'ai lu avec grand intérêt. Vous y découvrez une partie presque inconnue du monde et vous la faites découvrir aux autres. On voit, en vous lisant, que tout se tient dans l'univers islamique et que le problème des problèmes c'est le destin de l'Islam. Laissez vous faire mon bien sincère compliment.

    Et veillez croire, mon cher Vincent Monteil, à mes sentiments bien cordiaux."

L'imâm Khomeini

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    "Le ci-devant Shâh est mort et la république islamique en Iran est née, le 11 février 1979. C'est une révolution immensément populaire et intensément religieuse. C'est le retour de l'Iran de l'arrogance (estekbâr) à la Perse de la ferveur et du martyre. La bourgeoisie tâghûyi, mercantile, adoratrice du veau d'or (tâghût), reste "massivement présente, mais totalement neutralisée : elle ne compte plus".   

  Son admiration pour l'Imam Khomeini remonte bien avant la Révolution iranienne. Il lui rendra visite en France, lors de son exil, le 18 janvier 1979, à Neauphle-le-Château, quelques semaines avant son retour en Iran, puis en 1984

Le colonel Khadafi

  Le colonel Khadafi est une autre de ses "admirations". Il le verra une première fois à Paris le 24 novembre 1973, et le retrouvera à Tripoli en 1981.

LE VOYAGEUR

"Cette perpétuelle insatisfaction qui vous tire de Hanoï à Séoul, et de Dakar au Rocher Noir..." Louis Massignon

De Vincent Monteil, Théodore Monod parlera comme d'un "moine gyrovague" (12 juillet 1990). Il évoquera aussi, le lendemain, "le méridien Monteil Maroc-Sénégal (= Rabat-Dakar)".

C'est le Maroc, dès 1938, "notre commune patrie marocaine", dira-t-il à Jean-Mohammed Abd-el-Jalil.

Guerre et résistance

    En 1940, cependant, V.M. quitte le Maroc pour chercher à s'engager. Il est emprisonné à Riom et aura pour voisin de cellule Pierre Mendès-France avec qui il se lie d'amitié.

    En 1943, il participe à la Campagne de Tunisie avec les Goums marocains.

    De 1943 à 1944, il est à la 1ère D.L.F., sous les ordres du général Brosset. En 1945, le souffle d'une bombe allemande renverse sa Jeep à l'Isle-sur-le Doubs : jambe droite brisée, rotule éclatée. Longue convalescence avant de retourner au Maroc jusqu'en 1948, démissionnant après dix années de service aux Affaires indigènes du Maroc.

    Officier méhariste, V.M. est selon le mot de Louis Massignon un "amant de Goulimine". Il le lui dira à la parution de son ouvrage sur le Maroc, en 1962 : "Votre "Maroc"? Je viens de le lire deux fois ; la Ière, je l'avais trouvé "discontinu" et heurté dans sa saveur violente, assimilable par les seuls amants de Goulimine. A la seconde, j'ai partagé les impressions de Lacouture, et surtout de Mercanton, (qui comprend mieux que M. l'affinité de votre pensée avec la mienne)." (28 août 1962).

1948

  Vincent Monteil, observateur militaire en Palestine : "C'est justement pour faire respecter la trêve imposée par les Nations Unies et leur "Médiateur" Bernadotte, que je me portai volontaire, en juin 1948, comme "Observateur" militaire en Palestine. C'est bien la première fois que je fus titulaire d'une caret à trois volets, dont un en anglais, l'autre en arabe et le dernier en hébreu. C'est aussi la dernière fois que j'ai mis les pieds à Jérusalem."

 1950-52

   C'est ensuite l'Iran, Monteil est alors attaché militaire, de 1950 à 1952 : "Ambiance diplomatique (...) certes corrigée par la fréquentation assidue du peuple, des derviches et des étudiants". Après la parution de son ouvrage sur l'Iran - et à cause en particulier de sa dénonciation de la SAVAK, il y sera "interdit de séjour", jusqu'en 1979, date de la Révolution iranienne.

1953-54

       Puis la Tunisie en 1954, où V.M. jouera un rôle crucial dans les accords franco-tunisiens de 1955. Mais déjà en 1943, il a participé à la campagne de Tunisie avec les Goums marocains (20 mai 1943 au Tunisia Palace). En 1955, il est question de l'autonomie interne de la Tunisie. A propos du bey de Tunis, il dira qu'il était "plus soucieux de vivre en paix que d'assumer ses responsabilités politiques".

   "Tendres égarements"

    Puis, l'Extrême-Orient : La Corée (1953-53), le Vietnam. A quoi s'ajoutera, en 1972, la Birmanie.

1959-1968 : A travers l'Afrique

  De 1959 à 1968, Vincent Monteil sera à Dakar, à l'IFAN, l'Institut français d'Afrique noire, devenue en 1962, l'Institut Fondamental d'Afrique Noire. Il y succède à Théodore Monod.

    "Depuis sept ans, mon port d'attache est à Dakar, au grand souffle des alizés, à ce promontoire avancé de l'Afrique vers le Nouveau Monde. C'est là que je partage mon temps entre mes cours à l'Université, la direction de l'Institut Fondamental d'Afrique Noire (I.F.A.N.) et des voyages au cours desquels j'essaie de faire le pont entre l'Afrique blanche et l'Afrique noire, les francophones et les anglophones, les Chrétiens et les Musulmans." (1966).

    Et, naturellement, V.M. voyage beaucoup : Côte d'ivoire, Ghana, Nigeria, Mali, Mauritanie, etc.

1969-1971

    Il est nommé Conseiller culturel en Indonésie - "dans l'ombre chaude de l'Islam". Il en rapporte un ouvrage et des vues sur l'Islam malais qu'il publiera en 1984 (cf. sa conférence de juin 1970, à Djakarta, sur "Les relations entre les religions en Indonésie" revue en 1984).

    Birmanie, Albanie, en 1972, Japon, en 1973, Irlande en 1974.

LE MUSULMAN

De son propre aveu, Vincent Monteil fut, jusqu'en 1977, "a reverent agnostic", à la manière de J.Nehru, autrement dit un agnostique, respectueux des croyances des autres. Sa conversion reste le fruit d'un mûrissement intérieur - "les pensées ne mûrissent pas d'être dites". Elle coïncide également avec sa décision "de tirer, en allant jusqu'au bout, les conséquences logiques de l'engagement politique de toute ma vie pour que justice soit rendue à la Communauté des Croyants" (1984)

    C'est dans la capitale mauritanienne, en 1977, que Vincent Monteil prendra le nom de Mansour (=Vincent).

LE CHOIX

  Le choix de V.M. est désormais de la Palestine, de la République islamique d'Iran, où il sera invité à deux reprises en 1979, puis en 1984, et de l'Islam, en général, en tant que religion et communauté :

    "Vouloir ne prendre, pour objectifs, pour le double idéal de l'avenir, que les "valeurs occidentales" de la démocratie et du modernisme, en tenant la religion soigneusement à l'écart de la politique, c'est ignorer délibérément les racines profondes de l'Islam et sa vitalité persistante" (27 mars 1991).