ANNAMALAI SWAMI

La corde et le serpent

Annamalai Swami, La corde et le serpent, texte établi et présenté par David Godman, Arfuyen, 2006

 

 

 

Sur Annalamai Swami

Râmana Maharshi - Annamalai Swâmî, Comme une montagne de camphre, Enseignements sur la voie de la non-dualité (Advaita), Éditions Nataraj, 1996

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A propos de Ramana Maharshi : Le Soi est le Cœur

Henri Le Saux

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Actualité des Éditions Arfuyen

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Lire la présentation de La corde et le serpent sur le site des éditions Arfuyen :

http://www.arfuyen.fr

 

Bhagavan et bien d'autres enseignants ont fréquemment évoqué l'analogie entre la corde et le serpent. Lorsque vous prenez une corde au sol pour un serpent, celui-ci n'existe qu'en tant qu'idée dans votre mental. Il se peut que cette idée vous cause beaucoup d'inquiétude et d'anxiété et que vous gaspilliez beaucoup d'énergie mentale à vous demander comment éviter ou tuer ce serpent, mais le fait demeure: il n'y a pas de serpent en dehors de votre imagination. Lorsque vous voyez la corde - c'est-à-dire le substrat sur lequel votre fausse idée de serpent a été superposée -, l'idée que celui-ci existe réellement s'évanouit instantanément. Ce n'est pas un vrai serpent qui a disparu, mais seulement une idée erronée.

Le substrat sur lequel la fausse idée a été superposée, c'est le Soi Lorsque vous voyez le mental, vous ne voyez pas le Soi - le substrat sous-jacent - qui est caché par une idée trompeuse mais tenace. Et inversement, lorsque le Soi est vu, il n'y a pas de mental.

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Bhagavan disait souvent : "Le Guru incarné est le guide extérieur, il vous dit ce qu'il faut faire et vous pousse vers le Soi. Simultanément, le Guru intérieur, le Soi intime, vous attire à lui"

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Bhagavan a lui-même déclaré que celui qui vit au pied d'Arunachala n'a besoin d'aucune autre initiation. Si ces intentions sont pures et pieuses, le simple fait de vivre ici peut être une bonne sadhana.

Annamalai Swami passa l'essentiel de sa longue vie - il mourut en 1995, à l'âge de 89 ans - au pied de la montagne d'Arunachala, à l'ashram de Ramana Maharshi [Bhagavan], d'abord, puis à Palakottu, où il demeura dans la proximité de ce dernier jusqu'à sa mort, en 1950. Avec La corde et le serpent (2006), les éditions Arfuyen propose le recueil des derniers entretiens de ce disciple de Ramana Maharshi, rapportés par David Godman. Son enseignement introduit de manière exemplaire le lecteur occidental à la voie de la non-dualité, la voie métaphysique.

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Je n'ai jamais été un enfant sociable. Plutôt que de fréquenter les gens du village, je recherchais les endroits isolés pour m'asseoir et pratiquer le silence intérieur. [...] Lorsque mon père découvrit mon intérêt pour les questions spirituelles, il tenta de me décourager. Il dressa de nombreux obstacles sur mon chemin et ce ne fut que bien des années plus tard qu'il finit par admettre que mon destin était de devenir sadhu. [... ]

        Au cours de l'année 1928 - j'avais alors vingt et un ans -, un sadhu errant traversa le village. Il me donna un exemplaire de Upadesa Undiyar contenant une photo de Sri Ramana Maharshi. Dès que je vis cette photo, j'eus le sentiment que c'était mon Guru. Au même instant apparut en moi un ardent désir d'aller le voir. La nuit suivante, je fis un rêve : je vis Ramana Maharshi marcher des pentes inférieures d'Arunachala jusqu'au vieux Hall. Arrivé devant la porte, il se lava les pieds avec l'eau de son pichet. Je vins vers lui, me prosternai à ses pieds et sombrai alors dans une sorte de somme, tant le choc de sa présence (darshana) était intense. Alors que je gisais au sol, la bouche ouverte, Bhagavan me versa dans la bouche de l'eau de son pichet. Je me souviens d'avoir répété les mots : "Mahadeva, Mahadeva" - qui est l'un des noms de Shiva - tandis que l'eau coulait. Pendant quelques secondes, Bhagavan me regarda fixement, puis se retourna et entra dans le Hall.[ ... ]

        Je suis arrivé à Ramanasramam vers une heure de l'après-midi. En m'approchant du Hall, une partie du rêve que j'avais eu dans mon village se répéta en réalité. Je vis Bhagavan descendre de la colline, traverser l'ashram et s'arrêter devant le Hall le temps de se laver les pieds avec l'eau de son kamandalu [pichet]. [...]

        Une dizaine de jours après mon arrivée, je demandai à Bhagavan : « Comment éviter la souffrance?

      - Connais le Soi et accroche-toi constamment à Lui, répondit-il. Ignore le corps et le mental, car s'y identifier crée la souffrance. Plonge profondément dans le Coeur, et fais ­en ta demeure. »

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[Extrait]

- Comment pouvons-nous reconnaître un jnani ?

        - Pour le chercheur qui a acquis une certaine maturité, la présence d'un jnani se reconnaît essentiellement à ce signe : si le mental du disciple se calme sans le moindre effort, c'est un bon indice. Mais ce n'est pas un test valable ni probant pour tous. Si un chercheur débutant entre en présence d'un jnani, son mental restera probablement aussi agité que d'ordinaire. Pour le commun des mortels, il est très difficile de savoir qui est un jnani et qui ne l'est pas. Il n'existe aucun test qui fonctionne à tous les coups.

        Cela me rappelle une histoire que racontait Ramakrishna. Assis à l'ombre d'un arbre, sur le bord d'une route, un sadhu était en samadhi.

        Un homme qui cheminait par-là l'aperçut et pensa: « Il est probablement ivre. » Le sadhu était agité de légers tremblements que l'homme prit pour un tremblement d'alcoolique. Survint un second passant, mais le fil de ses pensées le mena à une différente conclusion « Cet homme a l'air heureux. Il attend sûrement sa fiancée. »

        Le soleil se couchait quand un troisième homme apparut. Il remarqua la silhouette assise dans la pénombre et se dit: « C'est peut-être un voleur. Sans doute se cache-t-il sous cet arbre pour sauter sur !es passants et les détrousser. Je ferai mieux de l'éviter au cas où il serait dangereux. » Il fit un petit détour à travers champs pour se sentir plus en sécurité.

        Peu après, vint un quatrième passant. C'était un chercheur spirituel confirmé et, dans l'ombre grandissante, il put discerner un halo de lumière autour de la tête du sadhu. « Il doit s'agir d'un être éveillé », songea-t-il. Alors il s'avança vers lui et se prosterna à ses pieds.

        Les gens perçoivent les jnani à travers le prisme déformant de leur mental. Ils ne peuvent pas faire autrement. Si vous portez des lunettes jaunes, tout ce que vous verrez sera teinté de jaune. Changez la couleur de vos verres, et ce que vous percevrez changera aussi de couleur. Le jnani ne porte pas de verres ni de prismes déformants susceptibles d'obscurcir, de fragmenter ou d'altérer sa vision. En tout, il voit Dieu, son propre Soi.